La vie en quarantaine est devenue le quotidien de nombreuses populations à travers le monde. Comment faire du marketing d’influence à l’heure du Covid-19 ? Sarah Levin Weinberg, co-fondatrice chez Stellar, dresse un bilan de l’écosystème des influenceurs et offre quelques conseils pour la communication des marques en ces temps difficiles, en donnant des exemples de campagnes inspirantes lancées aux quatre coins du monde.
Alors que la vie en quarantaine dans de nombreux pays du monde prend son plein essor, les communautés font de leur mieux pour s’adapter, se regrouper, et se soutenir, notamment grâce aux réseaux sociaux.
La communauté du marketing d’influence ne fait pas exception. Nombre de nos clients, partenaires, créateurs et confrères suscitent une prise de conscience positive et alimentent les discussions à coup de blog posts et de webinars. Aujourd’hui, plus que jamais chez Stellar, nous souhaitons stimuler notre industrie et y apporter notre voix unique – grâce à la diversité de nos solutions et de nos clients, nous avons en effet la chance de nous trouver à la croisée des chemins entre tous les acteurs de l’espace.
Au cours des trois dernières semaines, nombre de nos clients ont contacté notre équipe pour lui demander comment gérer leur marketing d’influence et, dans certains cas, s’ils devaient maintenir leurs campagnes ou en lancer des nouvelles. Nous avons créé cet article pour répondre à ces questions. Le tout, en gardant bien en tête que tout évolue chaque jour (voir chaque heure) et que nous n’avons peut-être pas encore de recul suffisant avec seulement trois semaines de distanciation sociale à notre actif. En tout cas, deux choses sont certaines : l’industrie du marketing est à jamais changée et nous croyons plus que jamais au pouvoir positif de l’influence en temps de crise.
L’industrie du marketing d’influence bouleversée en période de COVID-19. Oui, et alors ?
Une industrie mise à l’épreuve
Oui, l’industrie est mise à l’épreuve pour un grand nombre d’influenceurs et de marqueteurs. Pour autant, on ne doit pas parler de crise. C’est une réalité, une grande partie des événements et festivals sont annulés ou reportés, certains partenariats rémunérés sont mis en pause, annulés ou bien renégociés. Avec évidemment un fort impact sur l’activité et les revenus des créateurs de contenu. L’influenceur voyage Scotte Eddy ou le photographe Nicolas Stajic se sont récemment exprimés sur le sujet évoquant leurs pertes de revenus et craintes pour les mois à venir.
Les raisons pour les marques sont nombreuses : arrêt d’activité pour certaines, baisse de chiffre d’affaires pour d’autres, révision des priorités marketing ou simplement peur de communiquer en ces temps tumultueux. D’après Shanice Engel, Directrice de l’influence chez notre client l’agence OONA “parmi les secteurs les plus touchés, on peut citer le voyage, le luxe et la mode, non seulement parce que la communication de manière générale n’a pas lieu d’être ou serait mal perçue, mais parce que des problèmes évident d’acheminement de produits rendent les campagnes impossibles“.
Une industrie qui sait rebondir
Heureusement dans l’industrie du marketing d’influence, que nous soyons influenceurs ou marqueteurs, nous avons tous un point commun : la capacité à faire preuve de créativité et de réactivité à tout moment. Instantanéité des réseaux sociaux oblige, nous sommes en effet souvent confrontés à rebondir et réadapter nos campagnes à la volée. Aussi chez Stellar, nous conseillons à la plupart de nos clients de s’adapter plutôt que de renoncer, de revoir les stratégies initialement prévues, les concepts ou simplement les timings. Nous nous réjouissons de constater que jusqu’à présent, les marques sont réceptives aux idées alternatives et acceptent de changer formats ou dispositifs dans la mesure du possible.
Retour à l’authenticité et au dialogue
Beaucoup d’influenceurs comme les New-Yorkaises mode Katie Sands aka Honestlykate et Elizabeth Savetsky interviewées dans The Verge voient malgré tout également dans cette période une occasion pour les influenceurs de se réinventer.
“Je vois beaucoup de mes amis influenceurs être plus profonds que d’habitude et publier des contenus différents. Cela va changer l’industrie pour le meilleur, la rendre moins voyeuriste et plus basée sur les relations”, témoigne Savetsky.
Le confinement a sans aucun doute changé les influenceurs, leurs messages tant dans le fond que dans la forme, donnant naissance à une nouvelle relation avec leurs communautés. Plus créatifs pour faire face au manque de photographes professionnels ou de décors idylliques, plus présents via des live et rendez-vous quotidiens, plus “natures” et authentiques en invitant leurs followers à partager leurs (vrais) behind the scene… Bref, comme un vieux couple dont les partenaires se seraient éloignés en raison de rythmes de vie trop chargés, l’influenceur et son follower prennent désormais le temps de se parler et de se (re)découvrir.
Nous avons aujourd’hui plus que jamais besoin des influenceurs
Mobilisation
Le rôle premier des influenceurs est aujourd’hui évident. À l’heure de la mobilisation, ils sont un soutien incontestable aux gouvernements qui ont plus que jamais besoin de porte-paroles pour lutter contre la propagation du virus. Si le Royaume-Uni, le Québec, la Finlande ou plus récemment la Belgique ont fait pro-activement appel aux influenceurs pour sensibiliser les populations au Covid-19, l’ensemble des pays peuvent se réjouir devant la pléiade de porte-paroles qui se sont spontanément portés volontaires. Tous se sont rassemblés autour des hashtags #StayHome, #RestezChezVous, ou encore #ConfinementTotal, soit via des initiatives individuelles, soit via des campagnes et projets communs. Parmi lesquels, la campagne #SafeHands lancée par l’OMS sur TikTok pour challenger influenceurs et célébrités à montrer en musique comment se laver les mains en 40s ; ou encore la vidéo “Restez chez vous” qui a mobilisé 50 influenceurs dont MacFly et Carlito, EnjoyPhoenix, Cyprien, Norman ou encore Mister V. Leur objectif est commun : utiliser chaque jour leur influence pour sensibiliser leurs communautés aux gestes barrières et les convaincre de rester chez eux.
Divertissement
Au temps du confinement, les influenceurs sont de véritables remparts auxquels se raccrochent des populations qui ont plus que jamais besoin d’être connectées, de se divertir ou d’entreprendre des projets. Le temps passé sur les réseaux sociaux a considérablement augmenté et Zoom et Houseparty font désormais partie de notre quotidien. On ne compte plus le nombre d’initiatives prises par les créateurs de contenu pour nous maintenir en forme, nous apprendre à cuisiner, aider à structurer nos journées ou simplement pour nous faire rire.
Parmi les Français et les Belges, on retiendra par exemple : les vidéos hilarantes de Jeremstar, les rendez-vous live de Camille Lellouche, ou encore les vidéos quasi quotidiennes du média Konbini avec leurs interviews célébrités Make Home Great Again. Côté sport, un grand nombre d’influenceurs comme Sissymua offrent programmes, coachings et séances de sport live sur Instagram ou YouTube ; les influenceurs lifestyle comme Milkywaysblueyes ou Emiliegeois aident à remplir nos journées avec de véritables plannings et challenges ; pour ceux qui veulent s’évader en musique ils peuvent retrouver chaque jour à 18 h les mix live du DJ belge Kidnoizeworld sur Facebook et Instagram.
Solidarité
Certains influenceurs vont encore plus loin et font preuve de courage et de générosité pour soutenir les hôpitaux. La liste est longue, mais on peut citer Chiara Ferragni l’influenceuse italienne au 19M de followers qui a été la première à mobiliser les gens et créer une cagnotte collectant 4,3M€ d’euros pour un hôpital milanais. En Belgique, les influenceurs Enzo et Lufy créent eux-aussi une cagnotte ayant récolté près de 17.000€ pour la Fondation Roi Baudoin, fondation également soutenue par l’artiste influant Romeo Elvis qui lui reversera 100% des bénéfices des ventes de son e-shop. Dans le sillage de l’influenceuse Elise Goldfarb qui a lancé ce projet, Lenamahfouf aka Léna Situations encourage les marques beauté et les influenceurs à faire des dons de crèmes hydratantes pour les hôpitaux.
Pourquoi faire du marketing d’influence à l’heure du Covid-19 ?
La communication pendant la “Stay-at-home economy”
La question la plus fréquente qui nous a été posée est la suivante : “Doit-on faire en ce moment des campagnes de marketing d’influence ?”
Comme le disait récemment l’experte Instagram Jenna Kutcher, “ce n’est pas la saison de la tranquillité, mais celle de la communication“. De plus, d’après une récente étude de Kantar réalisée auprès de 30,000 consommateurs dans plusieurs pays, seulement 8 % des consommateurs pensent que les marques devraient arrêter la publicité en raison de l’épidémie de coronavirus. Les marques ne doivent pas arrêter de faire du marketing et cela comprend le marketing via les influenceurs. Leurs consommateurs passent plus de temps en ligne que jamais auparavant. Selon Kantar et Omdia :
– la navigation sur le web a augmenté de 70 %
– l’utilisation des réseaux sociaux a connu une augmentation considérable due au Covid-19 notamment Facebook (+37 %), Instagram (+27 %) et Twitter (+23 %)
– le nombre de visites sur Instagram Live et Facebook Live ont doublé en une semaine
– les téléchargements de TikTok ont explosé – passant de 25,4M à 28,5M en une semaine à la mi-mars, l’application vidéo de la Gen Z remporte l’unanimité.
Ce nouveau contexte offre une occasion unique de maintenir le lien avec son public afin d’accroître ou de maintenir l’affinité avec sa marque, de conserver la confiance, la fidélité et dans certains cas l’achat des consommateurs.
En effet, à l’ère de la “Stay-at-home economy”, les besoins, les habitudes de consommation et les comportements d’achat de chacun sont bouleversés. Les ventes en ligne et livraisons explosent dans certains secteurs comme en témoigne le dernier classement Stackline : de l’alimentation à la culture en passant par les équipements sportifs et de fitness le bien-être, l’hygiène et le loisir. Rien qu’en mars en France d’après Nielsen, l’e-commerce enregistrait une progression 4 fois supérieure aux magasins physiques avant confinement total et les livraisons à domicile avaient quant à elles grimpé de 72 %.
Des audiences et engagements jamais vus chez les influenceurs
Durant cette période unique que nous vivons, les influenceurs peuvent incontestablement soutenir les marques dans leurs efforts de communication quels que soient leurs objectifs, le marketing d’influence s’avérant extrêmement puissant en temps de crise s’il est bien géré et s’il s’accompagne d’une expertise importante. Plus que jamais, les consommateurs se tourneront vers les leaders d’opinion en qui ils ont confiance pour leurs choix en matière de divertissement ou d’achats.
Les analyses réalisées avec l’outil Stellar ainsi que d’autres études américaines convergent pour dire que le nombre de followers gagnés par les influenceurs a considérablement augmenté de mi-mars à fin mars. L’engagement des posts a augmenté de 61 % par rapport aux taux d’utilisation observés habituellement, les taux sont notamment très conséquents sur TikTok et sur Instagram qui voit également plus d’impressions pour ses campagnes et de vues pour ses Stories. Vous l’aurez compris : si l’on ajoute à la confiance le fait que le Reach, l’Engagement et le Temps passé sur les réseaux augmentent, il est facile de conclure qu’aujourd’hui est le moment opportun pour les marques de mener des campagnes d’influence.
Comment communiquer en temps de crise ?
Opportunités, mais pas Opportunisme
Donc oui, les marques peuvent communiquer en période de crise et notamment au travers d’influenceurs. Mais pas à n’importe quel prix et pas n’importe comment. De plus d’après une récente étude Edelman Trust Barometer réalisée dans plusieurs pays, 84 % des consommateurs pensent que les marques doivent user de leur influence pour informer, éduquer et faire preuve d’empathie et 65 % déclarent que la manière dont les marques vont répondre à cette crise aura un impact énorme sur leurs intentions d’achat futures. L’opportunisme doit être mis de côté et faire place à des publications qui ne portent plus que sur les produits, mais aussi sur les valeurs de la marque et ses engagements. Le tout avec une grande précaution pour éviter tout dérapage, car l’objectif est bien de maintenir la conversation, surtout pas d’être le sujet des conversations. Dans cette perspective, les influenceurs peuvent jouer un rôle considérable.
Si l’on souhaite parler de son offre produit, on devra oublier son calendrier éditorial initial et repenser sa communication. Cela comprend surtout de ne pas faire abstraction du contexte. En effet, certaines marques et influenceurs mettent de côté les produits trop chers, les post trop “glamour” pour ne pas heurter ceux et celles pour qui cette période est particulièrement difficile. L’influenceuse américaine Elizabeth Savetsky déclare en effet que depuis l’annonce du confinement fin mars, elle se montre habillée de façon simple sur son canapé, plutôt que parfaitement coiffée et vêtue de tenues hors de prix. Ne pas faire abstraction du contexte donc et peut-être même en parler afin de briser la glace. Kristin Cavallari, célébrité américaine aux 3,9 millions de followers et chef d’entreprise, a bien expliqué pourquoi elle faisait une promotion pour sa marque de bijoux Uncommon James, en déclarant simplement qu’elle avait 100 employés et qu’elle ferait tout ce qu’elle pourrait pour les aider à garder leur emploi, dont promouvoir sa vente sur Instagram.
Si l’on ne souhaite pas ou l’on ne peut tout simplement pas parler de son offre produit, il faudra alors créer des contenus à forte valeur ajoutée pour sa communauté en période de crise. Voici quelques-unes des nombreuses communications réalisées à travers le monde qui ont particulièrement retenu notre attention et qui peuvent servir d’inspiration :
Communications visant à pousser les gens à rester chez eux et adopter les bons gestes/suivre les règles pour lutter contre la pandémie
Nike
Dernière marque à encourager la mise en quarantaine, Nike a marqué les esprits avec cette punchline mémorable réalisée par l’agence Wieden + Kennedy Portland.
Sanex
Marque du groupe Colgate-Palmolive, Sanex a une grande légitimité pour rappeler les principes d’hygiène et les gestes barrières.
Audi et Volkswagen
Les marques emblématiques du constructeur automobile Volkswagen re-design leurs logos pour encourager la distanciation sociale
Initiatives visant à divertir et rassembler, et ainsi remonter le moral des troupes pendant le confinement
Etam
La marque de lingerie et de maillots de bain, également connue pour ses lignes d’intérieur et sportswear, collabore avec des ambassadeurs pour offrir à leurs abonnés des séances de sport en direct sur Instagram. Aria.official l’instagrameuse aux 131K followers a réalisé un “takeover” du compte Etam pour donner un cours de yoga en direct.
Revolve
La célèbre enseigne multimarque Revolve connue pour ses événements, vacances et voyages influenceurs épiques a dû radicalement modifier sa stratégie de contenu. Ainsi, pour remplacer le célèbre #revolvearoundtheworld, ils ont créé un nouvel hashtag #revolvearoundthehouse pour encourager leurs abonnés à “rester positifs, rester productifs et, surtout, rester connectés”. Ils partagent ensuite une tonne de contenus utiles et font de leur compte Instagram The destination pour les contenus “stay-at-home”. Comme les recettes de smoothie sur IGTV, les entraînements quotidiens sur Instagram Live, les Stories Instagram “Takeover” de certains influenceurs et même un Instagram live de DJ le week-end.
Burger King
La chaîne de fast-food connue pour ses communications originales a trouvé un bon moyen de divertir ceux et celles souhaitant réaliser les recettes de ses hamburgers fétiches.
Des paroles et des actes
Les marques peuvent également trouver des moyens uniques d’apporter une valeur ajoutée pendant cette période, en se rendant utile, autrement que via les communications. Faire des dons, soutenir les services hospitaliers, tenter de pallier le manque de protection, offrir gratuitement des produits ou services… Jamais autant d’actes de solidarité de la part des entreprises n’avaient été observés à travers le monde. Grands groupes, PME ou start-ups, chacun peut agir et faire avec ses propres moyens.
Le groupe LVMH est l’un des premiers à avoir agi en utilisant ses usines de parfumerie pour fabriquer du gel hydroalcoolique pour les hôpitaux, inspirant ainsi des groupes de beauté comme Estée Lauder, Coty mais également des plus petites marques comme Merci Handy et sa collection You Are Heroes.
Dans la mode, les usines servent à la fabrication des masques à destination du corps médical, mais également des travailleurs sur le terrain. Parmi elles, les marques Dior, Etam ou encore Chanel. Pour faire face à une pénurie d’appareils respiratoires, on fait appel aux constructeurs automobiles comme Tesla & co, qui a transformé ses usines en centres de production d’équipements.
Aider en tant que marque c’est également offrir gratuitement ou réduire le montant de ses produits et services pour soutenir ceux qui n’ont plus d’emploi ou voient leurs revenus diminuer.
Ainsi, si l’ensemble des téléopérateurs ont fait preuve de grande générosité comme Orange, Telenet ou Proximus, les acteurs du Food&Beverages livrent gratuitement ravitaillements et repas divers dans les hôpitaux comme les chocolatiers Godiva et Leonidas mais aussi et surtout un grand nombre de petits et moyens restaurateurs locaux.
Beaucoup reversent également une partie de leurs bénéfices aux hôpitaux, centres de recherche ou associations. Parmi eux, le chocolatier Galler, le parfumier d’intérieur Baobab Collections ou encore le retailer mode Zadig&Voltaire.